vendredi 30 juillet 2010

La veste du Gentleman

Dans ma chambre, sur la table de chevet, un faux soleil s’allume. Les murs s’habillent d’aurore rose et bleu. Je ne suis pas là. J’y étais mais je n’y suis plus. C’est comme ça. Mais si ce matin ressemble bien aux autres… Jeanne s’éveille nature. C’est-à-dire sans maquillage. C’est à-mieux-dire moche. Ses yeux ne sont plus cernés de rimmel mystérieux mais seulement de fatigue idiote. Son nez a l’air plus gros. Ce que je n’explique pas. Elle bâille et sa bouche s’ouvre sur le néant de sa cervelle. Elle n’est pas mignonne genre bougonne du matin. Elle n’est même plus bonne de la veille.
Un autre jour se serait éveillé pour moi sur sa vulgarité matinale, si j’avais été là.
Jeanne n’est pas faite pour le jour. Elle est une espèce de nuit. Comme la téquila ! Sel-citron ! La Boum-Boum ! Bouche en feu, lèvres acidulées. Et ton petit cœur fait boum-boum ! Une bombe ! Sexuellement universelle ! Dangereuse à grande portée et consciente d’être programmée pour ça. Ce que j’appelais la J.S.I. (prononciation : la Jessie), Jeanne’s Sexual Intelligence. La J.S.I. mise beaucoup sur le stroboscopiquement belle et l’alcooliquement irrésistible, qui prend évidemment lieu dans les boîtes et les bars. C’est un onanisme public qui se veut soit disant danse électrique. La J.S.I. est au GHB, ce que le 96 est 69. C’est un appel au viol !
Et le fait qu’on sorte ensemble n’y change pas grand-chose. Quelques sutras tout au plus. Dorénavant, je suis complice de ce viol mental, serviteur de cette drogue et acteur de cette comédie noctambule.
Théâtre du Mirano Continental
Acte Un : Elle se laisse peloter par ma personne tout en lançant des regards de glace aux filles et de braises aux mecs. C’étaient ses préliminaires à elle et moi je m’en foutais. Au mieux ça m’excitait. Puis quand j’estimais qu’il était temps d’amorcer la bombe vers une pipe boum-boum dans les toilettes de la boîte. Bouche en feu et lèvres acidulées ! Acte deux : Je relevais son t-shirt trempé au dessus de ses seins nus. Frottant le fer froid et lisse, du bois chaud, une plume ou une pierre plus rugueuse de ses immenses sautoirs contre son ventre, ses seins, ses extrémités roses pointues. Ses tétonnateurs ! Boum-Boum ! Acte trois : Hiroshima et Nagasaki dans sa bouche, mes vénérables testicules ! Du moins leur contenu…
La journée, elle est plus du style mine anti-personnelle. A éviter !
Tous les matins, elle a la gueule du manque. Du manque de quoi ? Bonne question ! Ca dépend de la veille. L’autre jour, je l’ai prise pour une saleté de luciole, elle gigotait dans tous les sens et sa tronche fluoresçait tant elle avait bu de sperme de taureau.
Je n’aurais vraiment pas pu voir ce vieux sac d’alcool se trimballer dans mon appartement aujourd’hui. Pourtant je l’imagine avec délectation.
Je ne suis plus là. Elle s’en aperçoit. Pauvre femme ! Son indépendance glisse de son visage. De l’aigreur pince sa lèvre. Elle est vexée. Son menton s’élève un peu. Elle regarde en direction de la salle de bain. Elle me cherche. Elle est seule. Elle se lève avec disgrâce, portant sa nuit. Elle titube jusqu’à ses pantoufles d’hôtel qu’elle a ramené d’un de ses voyages jusqu’à chez moi, dans ma chambre. Une chienne pissant au pied de mon lit. OHH ! Et là ! Elle tombe sur le mot que je lui ai laissé : « le petit déjeuner est servi en bas ».
Elle enfile son linceul de soie, le noue autour de la taille.
Il y a quatre ou cinq ans quand j’avais acheté l’appartement, j’avais fait dessiné des marches d’escalier qui tenait d’un seul côté du mur. Depuis une semaine quand je vois Jeanne descendre, je ne crois plus en cette architecture. Un mois. Un mois et trois semaines que je sors avec cette créature qui tous les matins s’appesantit sur les marches de l’escalier comme la matérialisation de mon mauvais goût. Une impression d’échec sentimental descend sur la colonne vertébrale de bois de mon appartement jusqu’à moi. Mais le véritable coup dur matinal c’est quand elle pose ses lèvres contre les miennes me donnant le sentiment d’avoir signé pour ce faux plaisir quotidien.
Je ne suis pas mieux qu’elle. Je ne suis pas bien avec elle.
J’ai honte d’elle. Quand je la regarde, je me juge dans ses yeux inexpressifs et l’écouter me narrer la soirée de la veille à laquelle j’étais, m’exaspère. Revivre cette soirée déjà pénible dans la langue sans images de Jeanne, dans sa bouche déjà occupée à ruminer. C’est comment dire ? C’est dur ! Dur de garder son calme. Inconsciente de me couper l’appétit, elle doit être aussi désespérée que moi pour ne pas s’en rendre compte. La journée s’effondre avant même d’avoir commencé. Sa poésie ridicule, son pouvoir désenchanteur, ses pensées sans ambitions, ses allers retours passé-présent, sa façon de me mêler à son inavenir, toute cette gerbe qui coule de sa bouche m’inquiète. Si les pipes me faisaient oublier ses conneries, maintenant même ma bite s’offusque d’avoir partagé la même caverne sans idées. C’est d’ailleurs comme ça que je vois l’intérieur de son crâne, une grotte avec de vieux dessins, schémas primitifs du mode de survie actuel qu’elle applique sans interprétation.
Je crois qu’au début je l’aimais bien. Son côté peuple ne me dérangeait pas, pas plus que sa trivialité. Au contraire, ma cervelle la trouvait fraiche, pas encore pervertie par tous les concepts facétieux de la société. Un peu plus jeune que moi, j’avais l’impression de sortir avec une ado, ou une fille de paysan qui s’amusait et s’émerveillait de tout ce que je lui apprenais. On ne fréquentait pas les mêmes endroits. C’était charmant. On ne connaissait pas les mêmes gens. C’est tant mieux ! Définitivement !
C’est la J.S.I. qui m’a mis dedans. Quand j’ai rencontré Jeanne, elle se pâmait seule sur un podium surplombant la scène de ses seins piriformes et nus. Elle avait des bottes cuir noir à talons, un short en jean et dieu sait où était passé son haut. Elle croisait et décroisait les bras dans un subtil jeu d’éclipse, son cul, pendant ce temps, faisait diversion. Aimanté jusqu’à elle, j’ai fini par mettre quelques doigts dans le creux de son genou et j’ai remonté à l’intérieur de ses cuisses. J’ai répété le mouvement à deux mains en m’installant sur le podium derrière elle. Son cul faisait un huit contre mon bassin alors que j’opérais toujours le même mouvement par devant. Je crois qu’elle savait que j’étais là mais elle ne m’avait pas accordé plus d’attention que celle des hochements de son cul devenant hoquets quand mes doigts frôlaient les bords de son string sous son mini short. Est-ce que mes doigts étaient des entités uniques pour elle ? Ou allait-on s’intéresser à moi ? Je ne savais absolument pas quantifier mon travail jusqu’à ce que tentant toujours plus… Je passais un doigt très léger sur son sexe à travers sa culotte. Disons devant six ou sept-cents personnes. Elle s’est penchée en arrière tout contre moi, les mains aplaties sur son ventre. Elle a posé sa tête sur mon épaule, l’a tourné vers moi, sans que j’arrive à voir son visage. Mais avec une superbe plongée sur ses seins. J’ai passé mon index et le major et l’annulaire sous sa dentelle. J’ai écarté doucement son clitoris avec le premier et le troisième pour ouvrir la voie au major expert en eaux troubles. Elle a ramené ses mains vers ses jolis fruits, en bonne marchande, elle les a comme soupesé. Alors que je jouais une de mes plus belles partitions, concentré, virtuose, elle a coincé chacun de ses tétons très fort entre le pouce et l’index. Apothéose visuelle et orgasme auditif que ce gémissement. J’ai cru un instant que le dj jouait très loin et que tout le monde avait eu le mauvais goût de se recueillir. Les gentils disciples de la musique, du sexe et bien sûr de la MDMA, l’Aphrodite qui les unit. Quoique ça pourrait être pas mal d’autres choses: le rabbin Cocostein, le curé Pilule, L’iman Haschisch, le gourou LSD… et puis toutes ces autres drogues sans religion… Le dos voûté par le plaisir, elle m’a demandé dans l’oreille, ses fesses branlant lentement ma bite : « Papa ? Je peux t’appeler Papa ? » Je me souviens avoir pensé que ce n’était plus une danse éléctro mais une dans d’Electre et m’être trouvé trop intello sur le coup. J’ai dit : « Il est temps d’y aller, chérie. » Je l’ai prise par la main. Elle m’a pris par la bite. On a récupéré son cuir au vestiaire où j’ai croisé mon ex. Elle était désolée de me voir comme ça et j’étais désolé qu’elle soit désolée. Jeanne m’a caressé derrière la couille, j’ai frémis et mon ex a détourné le regard. Je suis parti, ramené chez moi par cette incarnation nocturne de mon désir. Il pleuvait, elle a traversé très vite la large route le long du canal. J’ai couru après. Elle s’est engouffrée dans une ruelle. J’ai hésité à la suivre. Mais déjà son cul m’hypnotisait. Je sentais grandir en moi le flic près à attraper une pute dont personne ne connaissait l’existence. L’excitation de la chasse, la peur de ce quartier, la faim de sexe et la volonté de s’abandonner tuaient en moi. Ma bite indiquait sa direction et je courrais après ma bite. Bizarrement, il n’y avait plus personne, plus une chatte. Une main sur ma bouche me surprit mais trop fine pour me faire peur. Je me retournais vers mon agresseur. L’agression fût celle de mon esprit. Une beauté chienne en cuir ouvert sur des seins mouillés, le bouton du short en jean pas fermé, un genou qui me vient lentement dans l’entre-jambe. On m’adosse contre une bagnole et je me laisse dépuceler le fantasme. Mes mains plongent, ma tête suit. La chienne est devenue louve. Je lèche ses seins trempés et caetera sous la pluie et caetera contre la bagnole.
Depuis ce moment là, je suis devenu addict au J.S.I. et son parfum de grenade.

Un pauvre bol vide, une tasse sans dessous, une cuillère à double effet, du café soluble, de l’eau chaude, des céréales en boîte à côté d’un vase de tulipes l’attendent chaotiques sur la table à manger. Elle s’indigne du manque de préparation, du manque d’estime. C’est mieux que rien ! J’étais pressé. Et puis ce n’est pas tout…
Elle s’assied sur une chaise transparente à une table transparente. Elle se sert de céréales et une clé tombe dans son écuelle. Elle prend la clé entre deux doigts et l’amène jusqu’à cinq centimètres de son visage, genre première fois qu’elle en voit une. Mais je me plais quand même à lui imaginer une petite moue touchée.
Elle abandonne le petit déjeuner et entreprend les différentes serrures qui s’offrent à elle. Elle est encore dans l’expectative de savoir si elle découvrira une surprise qui lui serait destinée ou un quelconque secret qui ne l’était pas. Elle s’agite. Elle est attendrissante de curiosité, nerveuse. Bingo ! L’armoire du vestiaire s’ouvre. Un cadeau d’un volume respectable apparaît de manière évidente. Elle déchire l’emballage, émue. Elle prend par la lanière un sac Louis Vuitton qui plus tard s’avérera être un faux. Il est à son mauvais goût. Elle l’aime bien. Tout le monde est content. Elle réfléchit en petite fille à la raison d’un cadeau, cherchant du côté des anniversaires relationnels. Elle ne trouve rien mais sourit. Elle est jolie à l’idée qu’on lui ait fait une surprise. Elle fouille l’intérieur du sac pour en découvrir l’infrastructure et de nouveau elle tombe sur un mot.
Quelle chance ! Encore un mot !
« Remplis le de tes affaires ! On s’en va ! Le taxi sera là à 9h30 ! »
9h30, elle prend son mobile dans la poche de son survêt, il est déjà 9h. Une demi-heure pour réunir ses affaires et se préparer, c’est peu. C’est très peu ! Challenge accepté !
Elle fonce dans la chambre à l’étage. Une tempête des quelques habits qu’elle avait fait immigrés chez moi sévit dans ma chambre. Elle choisit parmi son maigre choix vestimentaire, un jean et un top blanc, pour aujourd’hui, deux sautoirs de brols d’argent, de bois et de plumes. Elle fourre ses affaires grossièrement dans le sac. Une tenue d’infirmière.
Elle n’est pas plus infirmière que mon petit doigt. C’est ce que j’avais conclu d’une prise de pouls sur mon sexe. Treize, si je me souviens bien. Je n’ai jamais vraiment su ce qu’elle faisait. Mais à une époque précédent mon avènement, elle était promogirl, un genre de mannequin de seconde zone. Elle avait pu garder deux trois tenues, dont une de flic qui ne survécut pas à ma garde-à-vue. En bon bandit, j’avais refusé de montrer mes papiers… Malgré une application de la loi douteuse, un coup de matraque dans ma hanche pour me montrer son dévouement au théâtre et un menotage étonnement professionnel. Il n’y eut aucunes plaintes. Aussi vrai que la matraque fit un double usage et les menottes furent attachées à la mezzanine.
Elle ignore une culotte Victoria secret jugée trop sale. Elle fond sur la salle de bain où déjà habillée, elle ne prend pas de douche. Elle se démaquille, se maquille, se peigne, se toise, se remaquille, se jauge, se coiffe… lunettes de soleil ! Elle enfile sa veste en cuir, retourne devant la glace, parfume sa silhouette. Cinq minutes encore pour faire l’inventaire des produits de beauté à emmener. En fait : besoin de tout. Son téléphone sonne. Elle est excitée à l’idée d’en parler à une copine. C’est le taxi. Elle le prie d’attendre deux minutes et va pisser quelques goutes aux toilettes.
Elle empoigne son sac à mains, son nouveau sac, un foulard et courre jusqu’à ses talons à côté de la porte. Elle a tout, vérifie et revérifie. Elle claque la porte.

Arrivée dans le taxi, elle s’étonne de ne pas me voir. Elle demande au taxi qui lui répond que je l’attends au rendez vous. Elle demande où. Il ne lui répond pas. Elle sort de son sac, son téléphone et elle appelle, à mon avis : Laurie. « Tu ne devineras jamais ce qu’il se passe… et blabla… et je t’avais dit que… mais en fait… blabla… » Elle lui raconte à quel point je suis génial, qu’elle est trop surprise et trop contente, qu’elle s’approche de la gare… « Attends deux secondes, il y a le taxi qui me donne quelque chose… ohhh… c’est un ticket de Thalys pour paris… blabla… et le retour est dans cinq jours… blabla… on ne va pas pouvoir se voir mais promis je te raconterai tout… blabla…moi aussi… bisous… je t’embrasse… je t’adore… d’office… c’est clair… gros kiss… allez ma puce… on se voit bientôt… passe une bonne semaine…blabla… »
Elle raccroche. « C’est déjà réglé ma jolie ! Allez-vous amuser !»
Elle déambule deux secondes dans le grand hall, se fait indiquer les destinations Thalys, courre en zigzag à travers la foule. Ses dessous de bras suent un peu d’impatience Rexonna. Elle arrive au quai quatre, deux minutes avant le départ. Elle grimpe immédiatement dans le train. Elle chipote à ses cheveux. Le contrôleur lui renseigne le bon wagon. Elle traverse un premier wagon plein de gens moyens puis un wagon bon chic bon genre et arrive à nouveau dans un wagon moyen où elle trouve sa place. Je ne suis pas là. Elle tripote une de ses mèches de cheveux.
« Il n’est pas là ! Où est-il ? »
Là c’est à moi ! Je toque à la fenêtre. Elle se retourne subitement et sourit en me voyant. J’ai un complet bleu marine, trois boutons dont j’ai juste fermé celui du milieu. J’ai les cheveux légèrement en pagaille d’avoir aussi dû me presser. Le chemineau siffle et une voix électronique annonce l’imminence du départ. J’allume une cigarette. Elle me regarde hébétée. Je la regarde. Son visage m’interroge à travers la glace. Elle ne sait visiblement pas quoi faire de ses mains. Elle passe ses doigts à l’arrière de sa tignasse et soulève ses cheveux. Les portes se referment. Elle ne comprend pas. Je lui souffle un baiser. Elle comprend. L’énorme machinerie se met en mouvement. Elle crie des mots que la vitre arrête. Je la regarde. Elle tape un petit coup de poing sur la vitre, me fait un doigt d’honneur et me jette ce que je suppose être son regard le plus méchant tirant sur ses rajoutes.
Le train s’en va.
Le plus simplement du monde, le train s’en va. J’essaie de me convaincre que le sexe ce n’est pas tout. Je pense à ma femme qui va bientôt revenir d’une mission humanitaire de deux mois.
Je jette ma cigarette à moitié fumée sur les rails. Je défais le bouton de ma veste et la regarde.
C’est une belle veste de Gentleman.

mardi 27 juillet 2010

Antimatière ou dieu déchu


Big Bang !
Je m’envolais et m’élevais, de plus en plus haut, dans un vertige à la fois ivre d’apaisement et ridicule de je ne saurais dire quoi mais ridicule. Ce qui se confirma dans l’instant d’après où je vis l’univers en contre-plongée, dans un terrible complexe d’infériorité.
Tout ce dont je me souviens, ensuite, c’est d’avoir nagé comme un dingue quand j’ai reconnu la désagréable sensation d’être un spermatozoïde. Je remontais la voie lactée, faisant la course avec des étoiles qui filaient beaucoup plus vite que moi, des stars, tous au moins d’anciens champions de natation. Devant l’immensité féconde, devant l’ovule de la galaxie, du cosmos ou je ne sais quelle conscience plus grande, la ligne d’arrivée, en soi, je me heurtais violement à la défaite d’une porte qu’on vous condamne. Je compris que j’avais été devancé. L’hymen avait été franchi, il y a longtemps. Cette vulve même plus vierge, cette pute de dimension inconnue déjà souillée, cette matrice peut-être même déjà engrossée, qui sait, se refusait à moi.
Pas toi ! Quoi, pas moi ?! On n’aime pas mon style ? Sous prétexte qu’on est un peu différent… Ah, c’est ça, on ne prend que les sportifs ! Désolé de vous le faire remarquer mais c’est tout à fait dépassé comme méthode de sélection. Non, non madame ! Je n’insiste pas du tout, je voudrais juste dire que dans le monde d’aujourd’hui…
Ce n’est pas possible, eh ben très bien, aucun problème.
Juste les habitués ! Vous savez, j’ai déjà…
Casting de merde ! Ovule à la con !
A moins que ce ne soit tout simplement pas la bonne période ? La porte de derrière ? Quelle réincarnation peut-on bien espérer de cette porte là ?
Recalé aux qualifs ! La honte !
L’important, c’est de participer…mon cul !
Mon orgueil d’homme aurait voulu se jeter sur un taxi pour fuir cette bourgeoise. Je n’eus, à vrai dire, que le temps de penser à ce que devenaient les éliminés de la nature, les non sélectionnés au concours de la vie. Les perdants de cette chance, les avortons du néant, les handicapés de l’idée, les idiots, les encore plus crétins de la vacuité, les renégats de rien du tout, les rejetés du vide, les dépressifs du non vécu, toutes ces espèces d’orphelins de l’existence, de mal sevrés, d’abandonnés, de mal aimés ; formats d’une édition à ne jamais paraître.
Presque quelque chose, presque quelqu’un, disons même, faute de savoir comment mieux me définir, j’aspirais à disparaître.
Privé de ma licence de futur fœtus, même pas la mention embryon, je glissais à toute allure sur cette trompe de salope, rebroussant le chemin des âmes. Avec pour seul réconfort de savoir maintenant pourquoi on l’appelle la voie lactée. Goute du désir, pour ma part, non assouvi, triste larme de sperme je dégoulinais lentement le long du vagin de l’histoire. J’eus un premier et dernier incertain priapisme mental dans le couloir du condamné comme si la corde du pendu s’était resserrée d’un cran lorsque descendant à travers le clitoris, j’effleurais son gland, à coup sûr l’âme de cet univers. Son soleil frétilla dans un tremblement cosmique et fît pleurer un dernier rayon de cyprine. J’emportais son sourire béat comme une lampe de poche intérieure contre l’obscurité de la fin. Ensuite, ses lèvres s’ouvrirent légèrement, me propulsant dans un baiser de mort vers la lumière. Une gigantesque chiotte à l’émail blanc presque brillant. Je loupais de peu le sauvetage du papier toilette qui allait servir au monde à essuyer mon passage.
Je finirai donc par faire la connaissance des damnés de la porte arrière.

La chasse me transcenda.

samedi 3 juillet 2010